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Les Mammouths
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Superordre |
proboscidiens, Proboscidea |
Sous-ordre |
Elephantoidea |
Famille |
Elephantidae |
Genre |
Mammuthus |
Espèces |
Mammuthus intermedius
Mammuthus primigenius |
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Les proboscidiens
sont actuellement représentés par les éléphants.
Les éléphants
actuels ont un crâne constitué d'os épais
mais pneumatisés, qui est donc allégé.
Les intermaxillaires sont allongés et limitent avec
les os nasaux, une vaste ouverture nasale bien éloignée
de la bouche, ce qui indique l'existence d'une trompe. La
mandibule est courte et haute, elle est munie d'une pointe
en avant de la symphyse. Le cou est raccourci. Les membres
sont très longs, en colonne, et sont adaptés
à supporter un poids très élevé,
terminés par cinq doigts englobés dans un coussin
élastique dont seuls les ongles dépassent. C'est
un type digitiplantigrade ou subplantigrade.
Le segment proximal des
membres est très allongé. Cubitus et péroné
sont bien développés et indépendants.
Les éléments
du carpe et du tarse s'alignent en séries verticales,
elles mêmes dans l'alignement des métapodes.
Cette disposition est dite sériée.
La paire
d'incisives supérieures est transformée en défense,
qui sont dépouvues d'émail et à croissance
continue. Le poids d'une défense adulte, qui est une
Di3, peut dépasser 100 kg. Les dents jugales dérivent
du type bunodonte à quatre tubercules avec des éléments
transversaux qui s'ajoutent en arrière. Il y a six
jugales successives par quart de mâchoire, avec une
seule en service et au maximum deux lorsqu'un remplacement
dentaire est en cours. La M3 apparaît vers 25-30 ans
et met 40 à 50 ans pour s'user, après quoi l'éléphant
meurt de faim. Il y a donc limitation intrinsèque de
la durée de vie des individus. Le remplacement dentaire
est horizontal.
Nous
nous intéresserons ici qu'aux deux espèces qui
vivaient aux alentours de 150 000 ans dans notre région
et dont on a retrouvé des restes à Romain la
Roche. Le lecteur est prié de se reporter au tableau
ci-contre pour toutes les genres qui ont vécu au quaternaire.
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Mammuthus intermedius
Il
est souvent confondu avec Mammuthus trogontherii, le plus
grand éléphant des steppes. Il est toutefois
plus petit et ses défenses ont une courbure plus
accentuée. Apparu après Mammuthus trogontherii,
il est l'ancêtre direct du mammouth vrai (Jourdan,
1861).
Mammuthus primigenius
Défini
par Blumenbach en 1799, c'est la dernière espèce
de la lignée et la plus évoluée.
Il apparaît vers 300 000 ans lors de la troisième
glaciation du Riss
(Saalien) et disparaît à la fin de la dernière
au Würm (Weischelien), il y a 12 000 ans environ.
Il est présent dans toute l'Europe où il
abonde.
Cliquez
içi pour découvrir la phylogénie des proboscidiens
!
La
diversité des opinions à l'égard
de la phylogénie des éléphants, en
général, entre les auteurs et le doute de
la validité et l'utilisation des différents
noms génériques et spécifiques n'aident
pas à définir le cadre évolutif de
Mammuthus primigenius.
Ainsi pour certains
auteurs (Trévisan, 1949; David, 1963), cette espèce
regroupe deux sous-espèces qui se succèdent
dans le temps. La première, de forme archaïque,
est attribuée à la sous-espèce Italicus
de grande taille et proche de Mammuthus trogontherii,
le mammouth des steppes. la seconde, plus évoluée
et plus récente est représentée par
la sous-espèce Sibericus. Celle-ci dépassait
rarement trois mètres de haut.
Actuellement, même
si la discussion reste ouverte, on retiendra que Mammuthus
primigenius, stricto sensu, succède directement
à Mammuthus intermedius, véritable "chaînon"
entre le mammouth des steppes et le mammouth à
toison laineuse.
Mieux
connu que ses prédécesseurs, on a retrouvé
régulièrement ses cadavres congelés
dans les sols de la Sibérie. Grâce à
eux, on a pu étudier son anatomie et ses parties
molles. Il était doté d'une fourrure épaisse
brun roux constituée de long poils dispersés
pouvant atteindre un mètre, et d'un sous-poil serré
d'une quinzaine de centimètres d'épaisseur.
Cette toison pendante,
sous le ventre de l'animal, le faisait paraître
plus grand. Il possédait une bosse graisseuse sur
le crâne et une autre sur le garrot.
Le profil du dos s'inclinait
vers l'arrière. La trompe et les oreilles étaient
également recouvertes de fourrure tout comme les
pattes et la queue qui disposait d'un clapet anal, une
sorte de petite glande qui lui servait à éviter
les refroidissements intérieurs.
Le
mammouth était ainsi parfaitement adapté
au climat froid. Les défenses énormes, chez
les vieux mâles, pouvaient atteindre plus de 4.50m
de long pour un poids de 120 kg. Elles s'enroulaient en
spirale vers le haut et l'extérieur. Elles pouvaient
être utilisées pour déblayer la neige.
Les mammouths mangeaient
des herbes (graminées), des fougères et
des mousses, des rameaux de saule, d'aulne, de bouleau,
etc. on estime à 200 voire 300 kg, la consommation
journalière d'un mâle adulte.
Ils
vivaient en grands troupeaux dans des paysages de steppes
et de prairies avec des bouquets d'arbres et de fourrés
de buissons. Il est très possible qu'ils aient
réalisé de grandes migrations saisonnières.
Si l'homme du Paléolithique
a beaucoup côtoyé le mammouth, il ne semble
pas, contrairement à tout ce qui a été
écrit et représenté, qu'il l'ait
réellement chassé, ne disposant pas d'un
armement suffisant pour affronter un adversaire de cette
taille.
Il
est en revanche très probable que l'homme ait abattu
des individus séniles ou très jeunes, ou
encore des adultes malades, blessés ou pris dans
des pièges naturels.
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Le
mammouth, qui n'avait guère d'ennemis naturels,
connaissait la mort par accident :noyades en masse lors
des crues de grands fleuves, enlisements dans les marécages,
chutes dans des crevasses ou dans des gouffres (Guérin,
1996).
Les
proboscidiens de Romain la Roche sont représentés
par un seul genre : le mammouth (Mammuthus) et par l'espèce
intermédiaire (intermedius). C'est la première
fois que cette espèce est attestée sur un
site préhistorique, ce qui constitue une découverte
majeure et inédite au niveau de la Franche -Comté,
voire au niveau national et international.
325 restes osseux
de mammouth ont été récoltés
dans le site. On les trouve surtout dans les couches VI
- VIIb,c et VIIIa. Quelques restes osseux de jeunes individus
sont encore présents dans la couche VIIIb par des
fragments de molaires, principalement.
Deux crânes
dont un de plus de 300 kg, trois mandibules, six défenses
spiralées, 24 molaires appairées et plusieurs
dizaines d'éléments post-crâniens
extrêmement volumineux, souvent en connexion anatomique
et appairés, ont été exhumés
dans des conditions souvent difficiles en raison du volume
et du poids.
Parmi
les pièces osseuses remarquables, une défense
de 3,40m de longueur a été mise au jour.
Celle-ci correspond à la plus grande défense
de cette espèce découverte en France. En
outre, une défense d'un mammoutheau de moins d'un
an a également été mise au jour.
Elle correspond à une pièce unique au monde.
De petite taille, elle mesure 2cm de longueur pour un
diamètre de 7mm.
Les
pièces osseuses se rapportant à un même
individu sont nombreuses. Le squelette le plus complet
est composé de 60% de son ossature.
La détermination
des molaires a été relativement aisée
grâce à l'état de conservation satisfaisante
et a permis de préciser le nombre d'individus.
Ainsi, quatorze mammouths
semblent s'être piégés naturellement
dans l'aven, tombés vraisemblablement par surprise.
L'étude
des proboscidiens a démontré que, pour la
première fois, l'espèce Mammuthus intermedius,
à savoir le Mammouth intermédiaire, est
réellement attestée sur un site préhistorique.
Cette espèce avait été définie
par Claude Jourdan en 1861 qui signale une molaire découverte
dans des lss anciens dans "la montée
des trois artichauts" à Lyon.
Ce dernier, jamais
découvert dans nos régions, constitue un
véritable chaînon entre le mammouth des steppes
(Mammuthus trogontherii) et le mammouth à toison
laineuse (Mammuthus primigenius).
1/ Ce résultat
est tout d'abord confirmé par l'étude biométrique
des molaires. Ces dernières sont les véritables
empreintes "digitales" de l'animal et apportent
de nombreux renseignements sur l'espèce, le mode
de vie et l'âge d'un individu au moment de sa mort.
A partir d'observations
(épaisseurs, forme et plissotements de la bande
d'émail, etc.), de différentes mesures (indice
de fréquence laminaire, hauteur et largeur de la
dent, etc.) et de calculs (quotient laminaire, rapport
longueur-largeur, etc.), il est possible de réaliser
une détermination spécifique d'un individu,
les critères différant d'une espèce
à une autre.
Ne pouvant entrer
dans ce bulletin dans le détail, je ne citerai
ici que deux d'entre eux à savoir : l'indice de
fréquence laminaire et le quotient laminaire.
L'indice de fréquence
laminaire correspond au nombre de lamelles sur une longueur
de 10cm, dans la partie moyenne usagée de la surface.
Il est de 5,5 à 6 pour Mammuthus trogontherii,
de 7 à 10 pour Mammuthus primigenius alors qu'il
est de 6,75 à 8,5 pour Mammuthus intermedius provenant
de Romain la Roche.
Le quotient laminaire
s'obtient en divisant la longueur totale de la dent par
le nombre total de lamelles. Il donne une idée
de l'écartement des lamelles. Il est de 12-18 pour
Mammuthus trogontherii, de 9-13 pour Mammuthus primigenius
et de 11 à 12 pour Mammuthus intermedius de Romain
la Roche.
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2/ Les nombreux
relevés effectués sur des os des membres
ont permis également de corroborer ces résultats.
Pour exemple, les fémurs d'individus adultes mesurent
1,30m de longueur. Comparées aux mêmes os
d'autres espèces de mammouth, ces dimensions s'inscrivent
entre les mesures obtenues sur le mammouth des steppes
(1,50m pour le plus grand fémur connu au monde)
et celles du mammouth à toison laineuse (1.20m
pour les plus grands).
3/ Dans
la chronologie des mammouths, le mammouth des steppes
apparaît vers -850 000 ans et disparaît vers
-300 000 ans. Le mammouth à toison laineuse est
connu dès -100 000 ans et disparaît vers
-10 000 ans. Ce qui constitue un véritable hiatus
de 200 000 ans dans l'évolution chronologique des
proboscidiens.
La datation uranium/thorium, réalisée dans
les couches qui contenaient les restes osseux de Romain
la Roche, date le site à moins 150 000 ans à
+/- 18 000 soit à la fin de la troisième
glaciation du Saalien (Riss) et plus précisément
au stade de la Warthe. Cette datation s'inscrit bien dans
ce hiatus, c'est à dire entre la disparition de
l'éléphant des steppes et l'apparition du
mammouth à toison laineuse soit entre -300 000
et -100 000 ans.
Mammuthus
intermedius constitue bien le lien évolutif entre
le Mammuthus trogontherii évolué et le Mammuthus
primigenius archaïque.
Ce mammouth intermédiaire,
un mètre plus petit que le mammouth des steppes,
pouvait atteindre la taille de 4.50m au garrot alors que
les mammouths à toison laineuse ne dépassaient
pas trois mètres.
Son environnement
est celui d'une steppe froide à graminées,
quelques buissons et peu d'arbres.
Cette découverte
importante fera l'objet d'une publication scientifique
au cours de cette année 2001.
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